Bonne année 2022 ! (et bilan du 1er trimestre)

Le bureau des Argonautes souhaite à tous et toutes une belle année 2022, qu’elle soit propice à de grandes scientifiques, qu’elle amène un peu de sérénité et surtout qu’elle voit chacun et chacune rester en bonne santé.

Pour son premier trimestre de l’année scolaire, notre association n’a pas chômé. Voici le bilan des actions menées par les Argonautes durant cette période :

1) Exposition « Paris – Athènes » au Louvre :Après une trop longue période chamboulée par la pandémie, nous avons pu enfin nous retrouver dans les musées, et dans le cadre de la reprise des activités de l’association, nous avons pu profiter de l’exposition « Paris – Athènes » mise en place par le musée du Louvre. L’exposition proposait de retracer la naissance de la Grèce moderne au prisme des relations entretenues avec la France. Il s’agissait traverser plus de deux siècles d’échanges, de créations artistiques, de conflits, de constructions culturelles, mais aussi de voir émerger la discipline archéologique en France par son implication dans les grands sites grecs antiques.  

2) Exposition « Préhistoire » au Musée d’Archéologie Nationale : le dimanche 12 décembre nous avons eu le plaisir d’aller découvrir l’exposition “Préhistoire” du MAN. Nous étions peu nombreux mais ce fut un très agréable moment convivial. D’autant que ce fut l’occasion de rencontrer l’association “ArkhéoPSL” avec qui nous aurons peut-être l’occasion de rester en lien pour de futures actions.  

3) Rencontre avec la direction d’AnHIMA : le 17 novembre, les directrices du laboratoire AnHIMA nous ont reçu pour échanger sur les attentes et les objectifs de notre association. Les échanges d’environ une heure ont été très constructifs et la direction s’est montrée très à l’écoute. Le Laboratoire va donc à nouveau financer partiellement certaines activités de l’association et fournir une aide logistique pour nos actions.  

4) Participation à l’AG du réseau Antiquité Avenir (CR en pièce-jointe) : le samedi 19 novembre les Argonautes ont siégé à l’AG du réseau Antiquité Avenir. Ce réseau, dont nous sommes un des membres fondateurs, a pour vocation de mettre en lien tous les acteurs associatifs du monde des études antiques. Bénéficiant de relais bien installés et importants, son AG est toujours un lieu de débats et de discussions. L’un des principaux buts de ce réseau est l’organisation des « Etats Généraux de l’Antiquité » en juin 2023, un temps fort ayant lieu tous les 3 ou 4 ans où se réunissent des personnalités du monde politique, de la communauté scientifique ou de la société civile. Le but est d’y dresser un état des lieux des questions liées à l’Antiquité en France et d’y « valoriser le patrimoine matériel et immatériel que la Méditerranée antique nous a légué ». Les Argonautes en tant qu’association de « jeunes » chercheurs et chercheuses sont très fortement invités et incités à proposer des ateliers, des tables rondes ou des déclarations pour cet évènement. Si certain-e-s d’entre vous souhaitent s’associer de plus près à la préparation des EGA par les Argonautes, souhaitent proposer un thème de table ronde ou un atelier, n’hésitez surtout pas à nous contacter ! 

5) Invitation des Argonautes à l’AG de la SoPHAU : le samedi 11 décembre, la Société des Professeurs d’Histoire Antique de l’Université a cordialement invité les Argonautes et Sorbonne Antique à venir parler des problématiques des doctorant-e-s et de ce qu’ils attendaient d’une société savante comme la leur. Plusieurs pistes ont émergé : la précarité, la solitude et l’anxiété face à l’avenir professionnel ont fait l’objet de discussion. La SoPHAU invite donc fortement les doctorant-e-s à adhérer à l’association afin d’être mis en lien avec un grand nombre d’acteurs du monde scientifique de toutes les générations, de poser leurs questions aux sociétaires, de bénéficier d’une information scientifique et administrative de qualité et de créer du lien et du réseau avec des chercheurs et chercheuses expérimentés. L’adhésion coûte 15€ par an. Pour les membres non titulaires d’un poste à l’université, elle implique un vote, mais celui-ci est fait en ayant en tête que la Société très favorable à l’inclusion des doctorant-e-s en son sein. L’Association des Professeurs d’Histoire et Géographie nous a aussi rappelé qu’elle s’adressait à tous les enseignants, du primaire au supérieur et qu’il s’agissait d’un formidable lieu de rencontre et d’échange entre historien-ne-s et géographes.  

Séminaire des doctorants 2018-2019

Le temps dans l’Antiquité

Organisé par A. Vasselin et M. Mazzei

« Qu’est-ce que le temps ? » Voilà une question simplement énoncée par Augustin d’Hippone mais qui dans sa réponse, ne peut se satisfaire d’une simple démonstration. Le temps, remarque le philosophe, est une intuition spontanée, « connue » et « familière » de tous, qu’il est cependant malaisé de définir. Loin d’être un concept universel et atemporel comme l’entend Kant, le temps est un construit historique et culturel. Une telle affirmation place de facto l’historien au cœur d’un véritable paradoxe. En effet, le temps, lui-même objet historique, ne constitue-t-il pas la matrice de son champ disciplinaire ? Pour outrepasser cette dichotomie entre temps de l’histoire et temps historique, il devient alors nécessaire d’établir des conventions qui témoignent, par ailleurs, des sociétés dans lesquelles elles sont produites. S’intéresser au temps dans l’Antiquité demande à s’interroger sur la manière dont les Anciens le percevaient, le mesuraient, l’imaginaient, l’organisaient et l’utilisaient. Un tel questionnement s’inscrit dans différents domaines de l’Histoire.

Le domaine le plus évident est sans nul doute celui de l’histoire des techniques : comment le temps était-il quantifié dans l’Antiquité ? Une telle approche renvoie ainsi à l’observation des phénomènes astrologiques et climatiques, à l’établissement du calendrier selon les cycles lunisolaires… Elle fait également écho aux moyens qui rendaient possible cette mesure – clepsydre, sablier, cadran solaire. La mesure du temps donnait sens aux sociétés : sur le temps long, elle scandait la vie agricole, religieuse et sociale des civilisations antiques ; sur le temps court, elle limitait la durée de certaines actions (cela pouvait être la durée d’un plaidoyer en Grèce ou la durée des gardes dans la légion romaine). Cruciale pour l’organisation des sociétés antiques, la mesure du temps distinguait temps sacré et temps profane. Ainsi à Rome, la division du temps opposait les jours fastes ouverts à l’action humaine (notamment la vie politique) et les jours néfastes réservés aux dieux. La religion donnait également corps aux temps « primitifs » où le merveilleux des mythes prenait le pas sur la réalité historique : les récits de fondation des cités en donnent une illustration parfaite. A une époque où vie politique et vie religieuse étaient étroitement liées, il n’est par conséquent pas étonnant de remarquer la consubstantialité du religieux et du politique en matière d’agencement du temps : l’archonte éponyme, qui assumait des charges religieuses (l’organisation des fêtes notamment) et des charges judiciaires à Athènes, donnait son nom à l’année pendant laquelle il exerçait sa charge.

Le rapport au temps dans l’Antiquité ne se limitait pas à la seule organisation structurelle des sociétés. De manière arbitraire, certains événements étaient mis en avant par l’instauration de « lieux de mémoire » (P. Nora).  Ces « lieux de mémoire » pouvaient être « monumentaux », comme les tumuli, ou « symboliques », comme la commémoration de la naissance d’Auguste. Dès lors, le temps devient subjectif : il n’est donc plus le même selon le groupe social étudié. L’identité de ce dernier peut même se définir par le rapport qu’il entretient avec le temps : la mise en place d’une généalogie – réelle ou fictive – en est un des aspects. A Athènes, les tribus portaient le nom d’un héros mythique (par exemple, celui d’Erechtée pour les Erechtéides) tandis qu’à Rome, la tradition faisait descendre les gentes d’ancêtres mythiques (ainsi la gens Iulia, issue de Iule, fils d’Enée et de Créuse).

In fine, ces différents axes de lecture nous permettent de nous interroger sur le lien entre l’appréhension du temps dans l’Antiquité et l’écriture de l’Histoire. Après tout, n’est-ce pas à Hérodote, auteur du Ve siècle av. J.-C., qu’est attribuée la paternité de l’Histoire ?

Séminaire des doctorants 2019-2021

Les noms dans l’Antiquité

Organisé par E. Colangelo, D. Bucchi et A. Zirah

Le séminaire des doctorants sur les noms dans l’Antiquité croise les problématiques développées par trois programmes de recherche du laboratoire ANHIMA, sur l’analyse étymologique et sémantique des noms de personnes grecs antiques (LGPN-Ling Paris/Oxford, programme « Recherches philologiques et historiques sur les inscriptions grecques »), sur les noms des femmes dans l’Antiquité (« Opérations Eurykleia. Celles qui avaient un nom », programme « Genre, sexe, sexualité dans l’Antiquité grecque et romaine ») et sur les listes divines dans les récits, les pratiques cultuelles et les images en Grèce et à Rome (« Panthéons en contexte », volet « Dynamiques religieuses des mondes anciens »).

Le nom, à la croisée de plusieurs domaines, a fait l’objet de nombreux travaux, qu’il s’agisse de leurs morphologie (Minon et al. 2017) et valeur (Hornblower – Matthews 2000), de leurs diffusions sociales et géographiques (Meissner et al. 2012 ; Parker 2013), de leur genre (Fine – Klapisch-Zuber 2017) ainsi que de leurs nature, transformation et innovation (Parker 2017 et Parker 2019). Pour l’Antiquité, ces questionnements ont été initiés par E. Benveniste, sur les noms d’agents et noms d’actions en indo-européen (Benveniste 1948), et élargis à l’anthroponymie, notamment par M. Fraser, éditeur d’un premier Lexicon des noms personnel en grec (Fraser 1987-), ainsi qu’aux théonymes et à l’onomastique divine (Belayche et al. 2005 ; Bonnet et al. 2018). En philosophie, ce sont les différentes traductions des noms abstraits qui ont retenu l’attention (Cassin 2004).

Dans le cadre du séminaire mensuel des doctorants, nous proposons de prolonger ces travaux en abordant les pratiques, les représentations et les discours attachés aux noms chez les Anciens, en privilégiant une approche tant philologique qu’anthropologique (portée notamment par Duranti 2004).

  • Quelles sont les spécificités de l’anthroponyme ? En quoi est-il différent de ceux des dieux, des animaux et des lieux ? Quel est le sens de ses représentations symboliques et métaphoriques ?
  • A quoi les noms sont-ils associés ? Comment s’articulent-ils avec d’autres parties du discours et de la langue ? Sont-ils liés à d’autres prédicats ? Quel est leur place et leur rôle dans les théories anciennes du langage ? Sont-ils dotés de qualités, positives ou négatives, selon leur usage rhétorique ?
  • Les noms peuvent êtres loquaces : que dit-on de leur significat et de leur performativité ? Quels sont les effets sociaux et politiques du nom pour un citoyen athénien ou romain ? Quelles sont les aptitudes attachées à la possession de certains noms « parlants » (aèdes divins, prophètes, héros, rois et hommes politiques) ? Existe-t-il une consécration du nom dans des contextes religieux et rituels, en épigraphie ou en littérature ? Et quelle fonction le nom a-t-il sur les vases ?
  • Quelles relations les noms entretiennent-ils avec le caractère et le corps ? Quel discours tient-on sur le « caractère du nom », des dieux, des humains, des animaux et des lieux ? Quel effet cela produit-il sur les lecteurs, anciens et modernes ?
  • Enfin, le nom peut-il « mourir » ? Quels sont les contextes de réutilisation ou de censure de certains noms ?

Les séminaires mensuels permettront à des doctorant.e.s, masterant.e.s et post-doctorant.e.s, de plusieurs disciplines et champs de recherche, de dialoguer autour de ces questions, à la lumière des sujets et des intérêts menés par chacun. On pourra également proposer le compte-rendu d’un des ouvrages listés dans la bibliographie sélective.

Bibliographie sélective

Liste des ouvrages à recenser pour le Séminaire des doctorants 2019-2021

Belayche et al. 2005 : N. Belayche, P. Brulé, G. Freyburger (éds.), Nommer les Dieux : théonymes, épithètes, épiclèses dans l’Antiquité, Brepols, 2005.

Benveniste 1948 : Benveniste É., Noms d’agent et noms d’action en indo-européen, Paris, Adrien-Maisonneuve, 1948

Bonnet et al. 2018 : Bonnet C., Bianco M., Galoppin T., Guillon É., Laurent A., et al.., « ‘Les dénominations des dieux nous offrent comme autant d’images dessinées’ (Julien, Lettres 89b, 291 b). Repenser le binôme théonyme-épithète », SMSR 84 (2018), p. 567-591.

Cassin 2004 : Cassin B., Le Vocabulaire européen des philosophies : Dictionnaire des intraduisibles, Paris, 2004.

Duranti 2004 : Duranti A. (éd.), A Companion to Linguistic Anthropology, Oxford, Wiley, 2004, p. 451-473.

Fine – Klapisch-Zuber 2017 : Fine A., Klapisch-Zuber C. (dir.), Le nom des femmes, dans Clio Femmes, Genre, Histoire 45/2017.

Fraser 1987- : Fraser M. (ed.), A Lexicon of Greek Personal Names, British Academy : Clarendon Press, 1987-.

Gambarara 1984 : Daniele Gambarara, Alle fonti della filosofia del linguagio : ‘lingua’ e ‘nomi’ nella cultura greca arcaica, Roma, 1984.

Hornblower – Matthews 2000 : Hornblower S., Matthews E. (dir.), Greek Personal Names. Their value as evidence, Oxford, 2000.

Lardinois et al. 2011 : Lardinois A. P. M. H., Blok J., Van Der Veer H. (éd.), Sacred Words: Orality, Literacy, and Religion, Leyde, Brill, 2011.

Malkiel 1993 : Malkiel Y., Etymology, Cambridge, Cambridge University Press, 1993

Meissner et al. 2012 : Meissner T. et al. (ed.), Personal Names in the Western Roman World. Proceedings of a Workshop held at Pembroke College, Cambridge, 16-18 September 2011, Berlin, 2012.

Minon et al. 2017 : Minon S. et al. (ed.), La suffixation des anthroponymes grecs antiques, Genève, 2017 (n°55 de la collection Hautes études du monde gréco-romain de l’EPHE).

Nagy 1994 : Gregory Nagy, Le meilleur des Achéens: la fabrique du héros dans la poésie grecque archaïque, Seuil, 1994.

Parker 2013 : Parker R. (ed.), Personal Names in Ancient Anatolia, Oxford : UP, 2013.

Parker 2017 : Parker R., Greek Gods Abroad: Names, Natures, and Transformations, Oakland, University of California Press, 2017.

Parker 2019 : Parker R. (ed.), Changing Names. Tradition and Innovation in Ancient Greek Onomastics. Proceedings of the British Academy, Oxford :UP, 2019.

Scheid – Svenbro 2014 : John Scheid et Jesper Svenbro, La tortue et la lyre: dans l’atelier du mythe antique, 2014.

Journée doctorale d’ANHIMA 2018, Corps et pouvoir dans les mondes anciens

Appel à communications

Journée doctorale d’ANHIMA 2018

« Corps et pouvoir dans les mondes anciens »

 

Le corps, issu du latin corpus, constitue la partie matérielle et tangible des êtres animés. Il peut aussi, par synecdoque, désigner la personne tout entière. Le pouvoir, terme également issu du latin, renvoie à la capacité d’agir, mais surtout à celle de gouverner, contraindre, discipliner. Les Grecs et les Romains disposaient d’un vocabulaire étendu et nuancé renvoyant à cette notion : archè, dynamis, energeia, potestas, imperium.

Depuis les écrits fondateurs de Marcel Mauss[1], l’étude anthropologique du corps et de ses techniques a suscité l’intérêt des historiens. L’ouvrage d’Ernst Kantorowicz paru en 1957 aux Etats-Unis, Les deux corps du roi, a éclairé la relation entre représentation corporelle et symboles du pouvoir au Moyen Âge. C’est par la suite à Michel Foucault que l’on doit d’avoir articulé systématiquement les notions de corps et de pouvoir, décrit comme l’expression d’une domination. Surveiller et punir montrait l’évolution de l’emprise du pouvoir judiciaire par le biais des châtiments, depuis les supplices spectaculaires d’Ancien Régime jusqu’à la discipline carcérale, au fur et à mesure que la punition ne s’envisage plus comme l’imposition d’une souffrance physique mais comme la privation des droits et de la liberté[2]. A la suite de Foucault lui-même[3], ce questionnement a été transposé à l’Antiquité, par exemple par Stéphane Benoist[4] et Jan Meister[5], dont les articles portaient sur le corps du prince et les symboles du pouvoir à Rome, ainsi que par Vincent Azoulay[6] dans son étude sur le lien entre la notion de charis et le politique. Le thème du sermo corporis a été par ailleurs relancé dans le débat contemporain selon une approche anthropologique du pouvoir.

La relation entre corps et souveraineté s’est imposée dans les historiographies anciennes et contemporaines, le corps du roi / tyran n’étant pas un corps comme tous les autres, mais investi d’une double nature, physique et symbolique, métaphore du pouvoir. Par exemple, le comédien Cratinos nous apprend que l’homme politique était à Athènes le candidat principal à la caricature : c’est ainsi que Périclès devient pour le public athénien un Zeus humain « à tête d’oignon, (…) portant l’Odéon sur sa tête puisqu’il échappe à l’ostracisme »[7]. Néanmoins, les récits mettant en scène Agamemnon, Atrée ou Œdipe permettent de relativiser cette association et nous révèlent au contraire le destin maudit, ainsi que l’aspect malade voire monstrueux du roi / tyran, dont le corps se fait portentum, véhicule de significations tragiques du pouvoir[8]. Le corps de Claude est présenté par Suétone comme monstrueux, comme si la nature ne l’avait pas terminé (nec absolutum), mais seulement ébauché (incohatum)[9]. Il en va de même pour les héros grecs, au corps souvent difforme et soumis à mutilation, meurtri, transpercé, morcelé, découpé, riche en signes renvoyant à la sphère de l’excès de dynamis et de l’anéantissement physique[10]. Signe, reflet et éloquent en même temps[11], le corps a été interprété comme signifiant dans les rapports de pouvoir, entre hommes, entre hommes et femmes et plus rarement entre femmes. L’histoire des femmes et l’outil du genre ont servi à exprimer ces rapports de domination, en mettant l’accent sur le caractère sexué et genré des corps[12].

Le corps a également permis de détecter les effets du pouvoir au sens large dans la définition des rapports de domination et de soumission entre les différents groupes sociaux et religieux, ou encore en histoire sociale de la médecine entre le médecin et son patient[13].

Ainsi, dans le cadre de la prochaine journée doctorale d’ANHIMA, nous proposons de renouveler le débat autour de l’axe corps-pouvoir dans une perspective collective, afin d’approcher les liens qui dans les mondes anciens unissaient les régimes corporels et le pouvoir. Les marqueurs corporels du pouvoir (tels que la stature, la carnation, la nature des traits, la force), tout comme les signes produits par l’impact du pouvoir sur le corps, pourront faire l’objet d’enquêtes. Les théories sémiotiques du pouvoir, les régimes spectaculaires et les pratiques culturelles fondées sur la mise en scène du corps pourront être de même mobilisés, abordés en croisant les modes d’approches, dans une perspective comparatiste et/ou interdisciplinaire. Les registres métaphoriques concernant, dans les discours, les images et les pratiques, le « pouvoir qui se fait corps » et le « corps qui se fait pouvoir » pourront être également susceptible d’analyses.

Nous proposons en particulier d’explorer l’axe en question selon des perspectives sensibles à la technique, au geste, au rituel, au juridique, au politique, au mythe, ainsi qu’aux représentations figurées et écrites. Le débat pourra porter (a) sur les manifestations du lien corps-pouvoir, (b) sur les acteurs qui y sont impliqués, (c) sur les discours qui articulent les deux notions, (d) sur la perception du couple « corps-pouvoir » et son héritage de l’Antiquité à nos jours. Les communications pourront s’inspirer des questions suivantes :

  • Peut-on identifier des « figurations corporelles » du pouvoir ?
  • Quels étaient les « corps puissants » et quel était leur rôle dans les sociétés anciennes, dans les pratiques et les récits ?
  • Comment les corps étaient-ils assujettis et à quels pouvoirs ?
  • Comment le pouvoir se manifeste-t-il sur les corps nus, vêtus et/ou masqués pour se conformer à un programme politique donné ?
  • Le paysage urbain antique peut-il, par sa topographie, exprimer les interactions entre pouvoir et corps par rapport aux individus qui l’habitent[14]? De même, y-avait-il des lieux particuliers censés accentuer une prise de possession visuelle, auditive, tactile ?
  • Y-avait-il des forces ou des facteurs émotionnels particuliers (comme l’eros sur le corps du tyran Denys) qui intervenaient dans des cadres de création et/ou d’affirmation du pouvoir ?
  • Les régimes politiques pouvaient-ils parfois interdire certaines utilisations du corps dans ses formes naturelles et artificielles[15]?
  • Comment le lien entre corps et pouvoir des dieux a permis de penser et façonner celui des humains ?
  • Quelle place faudrait-il attribuer au pouvoir des femmes au regard du pouvoir des hommes quand il est question du corps et de sa maîtrise ?
  • Quelle polarité imaginer, s’il en existait une, entre pouvoir du corps (sōma) et pouvoir de l’âme (psychè) ?

Les propositions de communication en français (titre et résumé de 200 à 300 mots) sont attendues pour le mercredi 28 février 2018. La journée doctorale aura lieu le samedi 19 mai 2018 en salle Walter Benjamin à l’INHA (2 rue Vivienne, 75002 Paris) et nous souhaiterions, comme pour les éditions précédentes, que les actes en soient publiés. Les éventuels frais de transport et d’hébergement seront à la charge de chacun.

Contacts: helene.castelli[at]univ-paris1.fr, eleonora.colangelo[at]univ-paris-diderot.fr

[1] Mauss 1936.

[2] Foucault 1975, p. 9-18.

[3] Foucault [1984] 1997.

[4] Benoist 2012.

[5] Meister 2012.

[6] Azoulay 2004.

[7] Cratinos, fr. 73 KA.

[8] Cf. la manus infesta de Thyeste (Sénèque, Thye. v. 533) et le caput infandum d’Œdipe (Sénèque, Oed. v. 871).

[9] Suet. Claude 3, 23.

[10] Voir notamment Brelich (1956), p. 244 et suiv.

[11] Garelli – Visa-Ondarçuhu 2010, p. 9.

[12] Scott [1986] 2012, 41; Boehringer – Sebillotte-Cuchet 2015.

[13] Léonard 1981.

[14] Comme dans Eschine, Sur l’ambassade, 225-314.

[15] Comme dans le cas d’interdiction des masques de la comédie ancienne par les Macédoniens d’après Platonios, Diff. Com. 13.

 

Bibliographie sélective :

Azoulay, V. (2004) : Xénophon et les grâces du pouvoir. De la charis au charisme, Paris.

Benoist, S. (2012) : « Le prince nu. Discours en images, discours en mots. Représentation, célébration, dénonciation », dans F. Gherchanoc, V. Huet, 2012, 261-277.

Bodiou, L., D. Frère et V. Mehl, dir. (2006) : L’expression du corps. Gestes, attitudes, regards dans l’iconographie antique, Cahiers d’histoire du corps antique 2, Rennes.

Bodiou, L., V. Mehl et M. Soria, éds. (2011) : Corps saccagés, corps outragés. Regards croisés de l’Antiquité au Moyen Âge, Turnhout.

Boehringer, S. et V. Sebillotte Cuchet (2015) : « Corps, sexualité et genre dans les mondes grec et romain », dans F. Gherchanoc, 2015, 83-108.

Brelich, A. (1956) : Gli  eroi greci, Roma.

Bruit Zaidmann, L., G. Houbre, C. Klapish-Zuber et P. Schmitt-Pantel, éds. (2001) : Le corps des jeunes filles de l’Antiquité à nos jours, Paris.

Büttner, S. (2006) : Antike Asthetik. Eine Einführung in ie Prinzipien des Schönen, Munich.

Cairns, D. éd. (2005) : Body Language in the Greek and Roman Worlds, Swansea.

Cleland, L., M. Harlow et L. Llewellyn-Jones, éds. (2005) : The Clothed Body in Ancient World, Oxford.

Corbin, A., J. J. Courtine et G. Vigarello, éds. (2005-6) : Histoire du corps, Paris.

Dasen, V. et J. Wilgau, éds. (2008) : Langages et métaphores du corps dans le monde antique, Cahiers d’histoire du corps antique 3, Rennes.

Dean-Jones, L. (1996) : Women’s Bodies in Classical Greek Science, Oxford.

Fögen, T. et M. M. Lee, éds. (2009) : Bodies and Boundaries in Graeco-Roman Antiquity, Berlin-New York.

Foucault, M. (1975) : Surveiller et punir, Paris.

Foucault M., ([1984] 1997) : Histoire de la sexualité, Tome 3. Le souci de soi, Paris.

Garelli, M.-H. et V. Visa-Ondarçuhu, éds. (2010) : Corps en jeu de l’Antiquité à nos jours, Cahiers d’histoire du corps antique 4, Rennes.

Garrison, D.H., éd. ([2010] 2014) : A Cultural History of the Human Body in Antiquity, Londres – New Delhi – New York – Sidney.

Gherchanoc, F., éd. (2015) : L’histoire du corps : bilan historiographique, « DHA », 41.1, Supplément 14.

Gherchanoc, F. et V. Huet, éds. (2012) : Vêtements antiques. S’habiller, se déshabiller dans les mondes anciens, Arles.

Karila-Cohen, K. et F. Quillier, éds. (2012) : Le corps gourmand d’Héraclès à Alexandre le Bienheureux, Rennes -Tours.

Léonard, J. (1981) : La médecine entre les savoirs et les pouvoirs. Histoire intellectuelle et politique de la médecine française au XIXe siècle, Paris.

Malamoud, C. et Vernant J.-P., dir., (1986) : Corps des dieux. Le temps de la réflexion, VII, Paris.

Mauss, M. (1936) : « Les techniques du corps », Journal de psychologie XXXII, 3-4, Paris.

Meister, J. (2012) : Der Körper des Princeps. Zur Problematik eines monarchischen Körpers ohne Monarchie, Stuttgart.

Monserrat, D., éd. (1998) : Changing Bodies, Changing Meanings. Studies on the Human Body in Antiquity, Londres.

Moreau, P., éd. (2002) : Corps romains, Grenoble.

Osborne, R. (2011) : The History Written of the Classical Body, Cambridge.

Porter, J. I., éd. [1999] (2002) : Constructions of the Classical Body, Ann Arbor.

Prost, F et J. Wilgaux, éds. (2006) : Penser et représenter le corps dans l’Antiquité, Cahiers d’histoire du corps antique I, Rennes.

Schmitt-Pantel, P. et F. de Polignac, éds. (2007) : Athènes et le politique. Dans le sillage de Claude Mossé, Paris.

Scott J. W. ([1986] 2012) : De l’utilité du genre, traduit par Claude Servan-Schreiber, Paris.

Squire, M. (2011) : The Art of the Body. Antiquity and its Legacy, Londres-New York.

Stähli, A. (2009) : « Krüppel von Natur aus. Der Körper als Instrument sozialer Rollendefinition im Medium des Bildes », in C.M. Mann et al., éds. (2009): Rollenbilder in der athenischen Demokratie. Medien, Gruppen, Räume im politischen und sozialen System, Wiesbaden.

Stewart, A. (1997) : Art, Desire and the Body in Ancient Greece, Cambridge.

Thommen, L. (2007) : Antike Körpergeschichte, Zurich.

Vigarello, G (1985) : Le propre et le sale. L’hygiène du corps depuis le Moyen Âge, Paris.

Appel Journée doctorale ANHIMA 2018

Zéphyr, l’olivier d’Anhima

Février 2017, un nouvel arrivant a été remarqué sur la terrasse menant à la bibliothèque Gernet-Glotz !

A l’initiative des doctorants, sur une idée de Dimitri Maillard, cet olivier a été acquis par le laboratoire Anhima, avec le soutien de la Directrice, Violaine Sébillotte-Cuchet, et du responsable administratif, Bertrand Darly. L’olivier a été choisi chez Truffaut.

L’olivier évoque la Méditerranée, soit le cadre spatial que les membres d’Anhima sont, pour la plupart, amenés à étudier, quelles que soient leurs aires temporelles et géographiques propres. Il s’agit donc du symbole de l’unité du laboratoire, à un endroit ou la plupart de ses membres se rencontrent informellement, la passerelle-terrasse du premier étage entre la salle Vasari et la rotonde. Depuis l’obtention de l’accord de l’INHA pour cet olivier, des rumeurs circulent qui parlent d’un second arbre pour orner cette terrasse  si peu verte, mais on n’en sait pas plus.

En mai-juin 2017, à l’issue d’un scrutin à trois tours qui a vu s’affronter de nombreuses idées pour nommer l’olivier, « Zéphyr » a finalement remporté la majorité des voix, sur une trentaine de votants.

Si vous vous intéressez à l’olivier et vous souciez de son arrosage, n’hésitez pas à en parler aux doctorants pour obtenir des informations. Durant cette saison Automne-Hiver 2017-2018, Zéphyr est habillé dans une robe blanche prêtée par Hélène Castelli pour protéger ses racines des gelures.

Actualités

28/11/17

Après un an d’absence, le site des Argonautes fait peau neuve ! L’essentiel de l’ancien contenu a été récupéré, il reste les articles de la période 2016-2017.

L’assemblée générale d’octobre 2017 a élu un nouveau bureau : Eleonora Colangelo, Dimitri Maillard, Marine Mazzei et Valentina Mussa. N’hésitez pas à vous adresser à eux !